Etre, Avoir et Agir
L’homme est une page blanche, le seul des vivants à se construire, à se confronter à ce vide qui le constitue et à devoir y inscrire une histoire que nul ne connaît, et surtout pas lui-même, avant qu’il ne l’invente. L’humain se définit par le seul fait qu’il se demande ce qu’il est.
Etre, un mot synonyme d’exister, d’identité particulière, de claire conscience de soi. Vérifions !
Notre identité est pourtant bien complexe, à la fois objective et subjective. Ainsi être chanceux, être malade, être roux, être notaire, être pauvre, être marié, être cocu, être célèbre, être bien dans sa peau …., comment se définir soi-même et devant autrui ? Ensuite est- on toujours libre d’être ce que l’on est ou voudrait être? N’y a-t-il pas déjà interaction du corps sur le mental – de l’âme disait-on autrefois ? Ajoutons-y une influence déterminante, bien qu’inconsciente, de l’extérieur sur notre être, sur notre libre-arbitre et nos croyances. Prenons en exemple « le modèle médico-psycho-sportif », qui définit implicitement un idéal, une norme (corps svelte, alimentation surveillée, crèmes adaptées…), pour toujours plus de dynamisme (quel que soit l’âge et l’activité), parce que nous serions tous nécessairement en compétition partout. Bref : tous des athlètes, dans tous les domaines et jusqu’à notre dernière heure. Mais où donc s’arrête le bon sens et l’hygiène de vie normale et où commence la névrose ? Et bien au-delà de la sphère privée, d’autres croyances collectives structurent, à notre insu, notre identité sociale comme nos sentiments de succès ou d’échec. Avec deux conséquences évidentes : l’essor du matérialisme et celui de l’individualisme
Avoir, c’est le mot qui condense l’association étroite entre le matérialisme et l’individualisme.
Avoir est un mot teinté souvent de morale : il faut s’occuper de l’être avant de penser à l’avoir, entend-on souvent. Pourtant avoir l’eau courante, avoir un chez-soi, avoir deux enfants, avoir bac +3, avoir des responsabilités … cela n’a rien de malsain. En fait, on associe à avoir, un comportement d’acheteur compulsif, de propriétaire aux besoins insatiables. Parce que l’on confond consommer et avoir. En caricaturant un peu, on peut dire que consommer détruit, alors qu’avoir préserve souvent. L’obsession de consommer mine l’avoir (sur le plan personnel, collectif, ou environnemental).
Comme on le voit, le débat sur l’être ou l’avoir, qui existe depuis la philosophie grecque, ne peut pas se contenter d’attribuer à l’un ou l’autre des deux mots une valeur toujours positive ou négative. Mais ce sont deux petites clés pour une réflexion féconde, si l’on évite les simplismes habituels.
Faire, voilà un mot qu’on associe, à tort, à énergie ou à dynamisme.
Parce qu’on pense à tort que faire est synonyme du mot agir, tel qu’utilisé en philosophie et en psychologie. Depuis notre plus tendre enfance, nous sommes encouragés à « faire », « faire nos premiers pas, faire nos devoirs, faire nos études pour avoir le bon diplôme, faire des voyages… Certains ont même fait Cuba, Madagascar et Bali, caméscope au poignet, sans avoir rien vu. Et tous ces faire sont censés nous rendre heureux et accomplis. Mais en fait nous avons réagi plus ou moins passivement, soumis à divers stimuli familiaux, sociaux, publicitaires. Une trajectoire de boule qui repart dans une autre direction après avoir heurté le bord de la table de billard. Mais ce n’est en rien agir. L’Agir en conscience, c’est une volonté de modifier une situation, de se confronter lucidement à une réalité, d’amplifier ou contrer un état de chose ou un état d’esprit. C’est être acteur d’un processus individuel ou collectif. Agir, d’après A. Comte, est l’une des trois grandes parties de notre existence : aimer, penser, agir.
Etre, Avoir, Agir (plutôt que faire) : y-a-t-il une entrée privilégiée dans le cadre d’un coaching ?
En fait il y a une causalité circulaire entre ces notions, chacune interagissant sur les autres, selon des temporalités différentes. Et personne n’en est exactement au même endroit dans ce cycle.
L’essentiel, c’est d’arriver, après quelques itérations, à cerner ses priorités véritables et intimes (autres que celles fixées par des règles sociales très relatives érigées en normes universelles).
C’est cela un travail de coaching : identifier l’origine de blocages divers, réfuter de nombreuses fausses vérités, se libérer de ses peurs, décider de passer à l’action et agir en toute lucidité.